Cinq syndicats appellent les professionnels de l’animation à la grève le 5 septembre 2016, pour protester contre le passage en force du gouvernement qui a pérennisé le 1er août 2016 les taux d’encadrement expérimentaux des temps d’activités périscolaires. De son côté, la CGT Fédération des services publics appelle les agents concernés à se mobiliser le 19 septembre. Une première dans le secteur de l’animation.

Avec 92% des communes qui proposent des activités périscolaires dans le cadre d’un projet éducatif territorial (PEDT), soit 96 % des élèves scolarisés dans les écoles publiques, la ministre de l’éducation nationale estime sans doute que la réforme des rythmes scolaires est une affaire réglée, à tel point que le sujet a été totalement éludé lors de son discours de rentrée, le 29 août 2016. Une intersyndicale regroupant les syndicats CFDT F3C, CFTC, EPA-FSU, SEP UNSA et UNSA Territoriaux se charge de le lui rappeler en lançant un appel à la grève pour le 5 septembre 2016. Un mouvement qui concerne tous les professionnels de l’animation : animateurs de la fonction publique territoriale comme du secteur associatif, coordinateur enfance jeunesse, mais aussi les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), qui se voient très souvent confier un rôle d’animation dans le cadre des temps périscolaires.
Passage en force

Cela faisait quelques mois que le ras-le-bol couvait chez les animateurs, et que les syndicats commençaient à montrer les dents, agitant le chiffon rouge d’une grève nationale devant le manque de dialogue sur les taux d’encadrement des temps d’activités périscolaires. Mais rien n’y a fait. Le gouvernement a décidé de passer en force, et de publier en plein cœur de l’été le décret n° 2016-1051 qui pérennise le taux d’encadrement d’un animateur pour 14 mineurs de moins de 6 ans au lieu de 10 et d’un pour 18 mineurs de plus de 6 ans au lieu de 14, pour les temps d’activité périscolaire.

Il est demandé aux grévistes de se rendre en masse devant leur mairie à 11h30, le 5 septembre, pour réclamer le retrait du décret du 2 août 2016. « Au-delà des taux d’encadrement qui augmentent la fatigue des enfants, et détériorent les conditions de travail des animateurs, nous exigeons une meilleure reconnaissance du métier. Les animateurs en ont assez d’être la variable d’ajustement de la réforme des rythmes scolaires, avec aux manettes un puissant lobbying des maires », s’insurge Marie Baggio, secrétaire générale adjointe du SEP Unsa, et coordinatrice du mouvement pour l’intersyndicale.
La CGT plus exigeante

De son côté, la CGT Fédération des services publics (FDSP) soutient le mouvement, mais s’est donné deux semaines supplémentaires pour mobiliser ses troupes. Le syndicat, qui ne fait pas partie de l’intersyndicale, appelle en effet à un mouvement de grève le 19 septembre 2016. « Le décret du 2 août 2013 stipulait qu’une évaluation du dispositif expérimental devait avoir lieu six mois avant son expiration par les signataires des PEDT, mais aussi que les collectivités devaient s’engager à professionnaliser leurs animateurs. Or les employeurs n’ont pas non plus rempli leurs obligations, soutient Malik Ghersa, animateur du collectif filière animation pour la FDSP CGT. Partout où les collectivités ont à cœur de mener une action pédagogique, cela se fait avec un encadrement supérieur à celui du décret. L’assouplissement des taux d’encadrement ne satisfait finalement que ceux qui ne jouent pas le jeu. Avec la réforme des rythmes, nous sommes davantage dans une réalité économique qu’éducative et pédagogique », déplore-t-il.

La FDSP CGT réclame l’alignement des taux d’encadrement de l’accueil périscolaire sur ceux de l’accueil extrascolaire, plus exigeant, d’un animateur pour 8 enfants de moins de 3 à 6 ans, et d’un animateur pour 12 enfants de 6 à 12 ans. Le syndicat exige également une campagne de professionnalisation sur tout le territoire, avec la titularisation de tous les animateurs qui répondent à des besoins permanents, avec prise en compte des temps de préparation et de réunion, pour un taux d’emploi à 100%, ainsi que le passage en catégorie B de tous les agents assumant des missions de direction et d’encadrement. « Le gouvernement a fait une erreur de refuser toute concertation. L’assouplissement des taux d’encadrement n’a même pas été discuté au conseil supérieur de la fonction public territoriale alors même qu’un rapport sur la filière animation de la FPT sortait en mai ! » s’étonne Malik Ghersa.
Montée en puissance

Rien ne laisse pour l’instant présager de l’ampleur du mouvement, puisqu’il s’agit de la première grève nationale du secteur de l’animation. Dans une enquête menée en avril 2016 par le Journal de l’animation, 72% des animateurs interrogés se disaient prêts à faire grève si le décret du 2 août 2013 était pérennisé. Mais comme le souligne Marie Baggio, « il s’agit d’un secteur précaire, où chaque jour payé compte ». En fonction de la mobilisation du 5 septembre, l’intersyndicale n’exclut pas de se rallier au mouvement de la CGT le 19 septembre, pour une montée en puissance du mouvement. « Tout dépendra de la réponse du ministère », ajoute Marie Baggio.

Le SEP Unsa prépare de son côté un recours auprès du conseil d’Etat pour contester la manière dont le décret expérimental du 2 août 2013 a été pérennisé, sans évaluation. « Certes, 92% des communes ont signé un PEDT mais quel bilan qualitatif a-t-on fait de la réforme des rythmes ? Quelle formation propose-t-on par exemple aux Atsem qui se retrouvent seules, en face à face pédagogique avec des groupes d’enfants alors qu’elles n’ont pas forcément été formées pour ça ? Comment construire une culture commune entre animateurs et enseignants ? » s’interroge Marie Baggio. Autant de questions qui pourraient trouver réponse si les ministres de la jeunesse et de l’Education nationale acceptaient de renouer un dialogue en berne sans se renvoyer la balle systématiquement.

Article de Michèle FOIN publié sur gazette.fr